Edgar Grolles

Une petite bafouille pour se présenter sans faire son timide.

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Edgar Grolles
Chasseur de Chimères
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Edgar Grolles

Message par Edgar Grolles »

Bonjour à tous.

Me présenter...

Alors, pour me présenter, je ressors un petit texte que je n’espère pas trop ennuyeux. L’action se situe dans les méandres de mon imaginaire, dans un lieu fictif, bien sûr, mais… pas tant que ça, finalement. Les personnages sont tirés d’une histoire que j’espère écrire un jour (bon sang que ça fait longtemps que je dis ça...) et que j’ai fait jouer de nombreuses fois autour d’une table.

Bonne lecture.
« Bonsoir… Salut à vous. »

Brr, on se les caille encore plus ici que dehors ! Un ravissant endroit vu de l’extérieur, une gargote, une fois entré. Je donnerai presque raison à l’autre, là, ce Bracasse. "Un vrai gourbi à traine-cul" qu’il l’a appelé. J’en souris, mais j’enrage de ne pouvoir le contredire.

« Non, je ne resterai pas longtemps. Juste le temps de poser ma cape et de me rafraîchir le gosier d’une de ces bien tentantes boissons que vous exposez derrière vous.
Comment ? »

Bon sang, que lui répondre ? Repartir par ce temps ? Il pleut des cordes. Je ne peux rester parmi cette bande de va-nu-pieds, des crétins pour la plupart, cela va sans dire. Et pourtant, cette vaste salle, ces tables robustes en vieux bois massif, ce feu nourri dans cette cheminée odorante de la volaille qui y flambe… cela me procure des frissons que je n’ai pas ressentis depuis un bail ! Mais ces gens sont si… étranges. Et celui-ci qui me fixe de ces grands yeux inquisiteurs ! Ô comme ce Bracasse a bien fait de rester dehors ! Il va dormir mouillé, se réveiller trempé, mais au moins verra-t-il le jour pointer le bout de son nez.

« … Ouu… oui, bien sûr. Vous pensez bien que je ne souhaite pas repartir ce soir. La nuit est proche et le chemin si long. Je vais prendre une de vos plus belles chambres. Un bon lit, oui, un bon et confortable lit, cela va sans dire.
Pardon ?
Oui, je suis seul… seul. »

Et voilà, on y est. Ils savent tout. J’ai vu leur regard glisser sur moi. Ce nigaud aurait pu parler moins fort. Il a presque hurlé ma solitude ! Depuis que j’ai posé mes pieds sur ce chemin, je ne me suis jamais aussi mal senti. Cet étrange Bracasse, horripilante créature, puante bestiole, n’est pas la plus agréable compagnie qui soit, il est vrai, mais il a l’avantage d’en être une. Il ferait presque office de gentleman parmi ce ramassis d’abrutis. Voyez celui-ci. Il a fourré son doigt si loin dans son nez qu’il a des soucis pour le ressortir ! Il ne serait guère étonnant qu'un fluide plus ou moins suspect, venant du plus profond de son appendice, recouvre l'anse de sa chope de bière. Et à la table voisine, cette horrible femme à la pèlerine usée jusqu’à la corde ne cesse d’abreuver son entourage de son ignoble rire, grossier et vulgaire. Son compagnon, frustré et silencieux, se ratatine sur sa chaise jusqu’à l’invisibilité. Quant à ce couple, planqué contre le mur du fond… Ils doivent bien être les seuls à ne pas m’avoir remarqué, occupés qu’ils sont à se manger la langue depuis mon entrée. Et je n’ose poser mes yeux sur ce vieillard à l’allure malsaine qui me harcèle de son regard perçant…

« Bien, je vais donc m’installer à une de vos ravissantes tables. Quoiqu’il y ait foule ce soir, dites-moi ! C’est habituel ?
Oui, je sais, le Chemin est plutôt fréquenté ces temps-ci. Et puis la pluie, l’orage, oui… cela doit faire tourner votre affaire, cela va sans dire. »

Le gargotier tourne les talons. Je remarque qu’il n’a pas pris ma cape, que je lui tendais. Sympathique établissement, à la hauteur des attentes de ces occupants. Donc, prenons place. Cette table fera l’affaire autant qu’une autre. Assez éloigné des épanchements des deux tourtereaux pour ne pas les interrompre, à bonne distance du sinistre vieillard et, je l’espère, du crachoir de l’horrible gourgandine. Ah, enfin du beau monde ! Ravissante, vraiment ravissante. Joli brin de fille ! Le patron devrait lui faire ouvrir sa porte aux voyageurs. Elle ferait, à n’en pas douter, un plus plaisant accueil. Longue chevelure fauve, visage fin, nez mutin, bouche appétissante et quelques taches de rousseur idéalement éparpillées sur sa peau de pêche. Je tombe amoureux ! Sourire, sourire.

« Bien le bonsoir, demoiselle !
Je prendrai, tenez, comme le… comme ce vieil homme-là. C’est une boisson chaude, non ? Une infusion, un thé ?
Ah ! Diantre, qu’est-ce donc ? Une plante que je ne connais pas, cela va sans dire. Venue de loin, j’imagine. Bon, je prendrais cela. »

Sourire, sourire, elle est si belle, ses yeux sont d’un vert où l’on se perd.

« Vous n’en avez pas ? Mais…
Il l’a apporté ! Dommage, cela m’a l’air assez parfumé, ma foi. Autant que votre présence à mes côtés. Tant pis, je vais rester classique, alors. Un bon thé pour me réchauffer, puis je prendrai une bonne assiette de haricots accompagnée de cette volaille rôtie qui pendouille. Avec une bonne bière, cela va sans dire. »

Elle a souri ! C’est la fête ! Mais dites-moi, l’arrière-cour est aussi charmante que la façade ! J’en ai le sang qui boue. Grrr ! Elle m’en fait oublier cette assemblée de vauriens.

Tiens le vieux a cessé de me fixer derrière sa barbe. Merde, il se lève. Et il prend son bol, vacille vers moi en marmonnant ! Que tintinnabule-t-il ? Que me veut-il ? Oh, je sens que je vais avoir un invité à ma table ! Grand, maigre, il a la tremblote. Il porte des braies sombres, peut-être sales, allez savoir avec le peu d’éclairage de la pièce. Son pourpoint est ample et laisse apercevoir un torse couvert de poils aussi blancs que ceux de sa barbe. Et tout pendouille là-dessous. Beurk. Que faire ? Être poli, bien sûr, mais juste assez pour ne pas être un malotru, sans pour cela paraître de bonne compagnie. Un sourire, tout de même, pour le respect dû à son grand âge.

« Bonsoir, puis-je vous aider ? »

Il s’assied. Pas besoin de mon invitation, semble-t-il !

« Ah, bien. J’allais justement vous proposer… Mais je vois que vous buvez déjà. Odorant rafraîchissement que vous avez là. On y sent le parfum de la pomme mêlé à celui plus onctueux des fruits des bois… je ne saurais dire. Peut-être un soupçon de…
Ah oui ? Étrange. Je n’en ai jamais entendu parler. Mais il faut dire que je ne me suis engagé que récemment sur le Chemin, je… »

Sa voix est rauque, grinçante, à l’image de son regard. Son visage fripé me ficherait la trouille n’importe où ailleurs.

« Je… heu ! Oui, je suis un Marcheur, effectivement. Novice, oui, cela va sans dire. Pourquoi ?
Ah, vous posez les questions et… Cependant, excusez-moi, mais…
Très bien, ne vous fâchez pas ! Pas d’énervement, je vous prie. Faites attention à votre bol. Je vais me présenter, pas d’inquiétude. La bienséance l’oblige et ce que je fais sur le Chemin n’a rien de mystérieux ni de secret. Je n’ai rien à cacher. »

Diantre ! Sénile, mais convaincant. Il est totalement givré, cela va sans dire. Mais je le dis quand même. Et il ne va pas me lâcher, le bougre. Ô, Bracasse, tu me manques presque, toi, tes pets retentissants et tes horribles raclements de gorges ! Tu n’aurais guère attiré les gens à nos côtés. Dommage pour la serveuse, mais ô combien efficace pour éviter ce genre de rencontre à la gênante indiscrétion.

Par contre, sa mixture est enivrante. Les effluves parviennent jusqu’à mes narines dans un cortège nuptial entre l’euphorie et la curiosité. Si j’osais…

Ah, voici mon thé ! Et si élégamment servi. Sa poitrine est d’une générosité à combler le plus gourmand des hommes, ses hanches à terrasser le plus vaillant ! Je suis amoureux.

Il lit dans mes pensées ! Il verse une lampée de son breuvage dans mon bol avant d’en boire une gorgée comme pour m’assurer de ne pas voir en cela quelque malveillante action. J’avoue ne pas en être mécontent. La curiosité et le parfum exotique de cette boisson ont éloigné de moi toute prudence.

Le goût n’a rien à envier à l’odeur. Le thé est oublié, le liquide ignoré. J’ai l’impression d’avaler de la fumée, à peine solidifiée, et pourtant tout aussi capiteuse que le meilleur des vins et assez onctueuse pour ne pas frustrer la langue. Jamais je n’ai bu pareil breuvage ! Je dois avoir l’air béat, vu la manière dont il me regarde, sourire en coin, mâchoire branlante. Il sait y faire, le vioque. Il m’invite à discuter.

« Fameux, vraiment ! Un délice. Et vous dîtes que ça s’appelle…
Oui, bon, ne soyez pas désagréable. Après tout, je ne vous connais pas non plus…
Ok, ok. Bon, je me nomme Edgar, Edgar Grolles. Je sais, ce n’est guère original, mais a-t-on besoin de l’être dans un tel endroit où l’originalité est coutumière, établie, banale ? Et lorsque je ne suis pas sur le Chemin, je vis à Chatou, en région parisienne. Cela ne vous dit rien, je suppose. »

Pourquoi lui parler ? Pourquoi lui raconter ma vie ? Le Chemin est assez nouveau pour moi, cela va sans dire. Ce Bracasse a quelque peu contribué à éclairer ma lanterne, mais… je suis encore loin d’y voir tout à fait clair. Enfin, il a l’air de vouloir en savoir plus sur moi, le gaillard ! Et s’il peut me resservir une lampée…

« Comme tout le monde, j’ai un travail, je bosse dans l’imprimerie, la reprographie, et je dois dire que ça me plaît. Ce n’est pas trop contraignant et ça me laisse pas mal de temps pour mes passions. »

À nouvelle gorgée de sa liqueur, nouvelles émotions. J’oublie toute retenue. Je m’esclaffe en regardant le vieux et sa tête d’ahuri. Il est comique, absurde et grave. Combinaison incongrue. Je crois que je dois lui ressembler un peu avec ma tasse de thé, qui est loin d’en être à présent. Il pose une main frémissante sur la mienne. Façon de me suggérer de ne pas m’égarer. Continuer, je dois… comme dirait l’autre.

« Et bien, j’arpente le Chemin depuis peu. Mais je pense que l’origine de ma venue est ancienne, si ancrée en moi qu’elle a franchi les obstacles de ma vie et de ma mémoire pour permettre à mes pas de trouver leur voie. Donc… je suis dans mon lit, brave jeune homme ayant tout juste atteint la quinzaine, fatigué d’une longue et épuisante journée au collège (relatif, tout ça, bien sûr, disons éprouvante d’ennui et d’extrême lassitude…) et prêt à récupérer par un sommeil grandement mérité. Lorsque s’ouvre la porte de ma chambre. Une silhouette se distingue parmi les ombres. Une fraîcheur comme je n’en avais encore jamais ressenti s’est emparée de moi. Vrai de vrai, c’est comme je vous dis ! »

Le souvenir de cette nuit me fait encore frissonner ! Plus de vingt-cinq ans après. Qu’ai-je à lui raconter cela ? Le pire est que ça à l’air de le captiver, l’affreux. Je continue et, cela va sans dire, peut-être aurai-je droit à une autre gorgée de sa potion magique. Avec, en prime, un sourire de la pimpante rouquine, qui sait ?

« L’ombre est de haute taille. Imposante, froide, glacée. Je sentais sa maléfique présence jusque dans mon lit. J’étais paralysé de terreur. Je ne pouvais ni bouger ni appeler ! La forme obscure a glissé le long de la pièce pour atteindre mon côté. Sans pouvoir distinguer de détails dans les traits de son visage ou de sa vêture, je pouvais apercevoir ses formes dans la pâle lueur offerte par le peu de clarté lunaire que laissaient passer les interstices de mes volets. Vaguement féminine, elle était mouvante, changeante. Juste un ensemble de ténèbres gelées se déplaçant vers moi dans un silence de caveau. Puis elle s’est penchée au-dessus de moi. Je hurlais sans un bruit. J’ai dû pisser, aussi, quand elle m’a pris la main. Dîtes, je reprendrais bien un peu de votre… truc, là. Ça vous ennuie si… non ? »

Je ne peux que l’avouer, les apparences sont trompeuses. Il ne faut pas se fier à une première impression. Toujours inexacts sont les messages de la conscience quand les évènements ne sont pas propices. La méfiance est une putain de baratineuse. Ce gars-là est plutôt sympathique. Il me ressert, c’est évident… cela va sans dire. Bordel, que c’est bon, ce machin !

« Désolé, ben oui, c’est tout. Elle m’a pris la main. C’était horrible. Et froid. J’avais si froid. La pièce entière était plongée dans un cruel froid polaire. Je criais, mais aucun son ne sortait de ma bouche. Sa main tétanisait la mienne et l’ombre de son visage se postait au-dessus du mien. Je pouvais sentir… puisque je ne voyais rien, ressentir son regard pénétrer mon être, sonder mon âme. J’étais au-delà de la terreur. Là d’où l’on n’est pas censé revenir. Mais je suis là, et c’est tant mieux. Où peut-on se procurer cette boisson, par pitié, dites-moi. Elle est si parfaite, si goûteuse. »

Ah ! Ne serait-ce pas une pointe d’agacement dans ses yeux ? Je m’en moque. L’ancêtre veut en savoir plus, il va devoir raquer. Il va servir et resservir, je te le dis. Et la rousse, elle est où ? Là, oui, elle est là… quel châssis, bon sang, quel châssis ! Bref. Je ne veux pas fâcher le vieux, non plus. Il a l’œil inquisiteur de celui qui tient à connaître la cachette d’un objet rare, convoité, et me regarde pourtant comme celui qui a la carte pour le trouver. Cependant, il a aussi ce fabuleux nectar dont je ne peux me rassasier. La suite est une sorte de révélation. Comment les mots pourraient-ils traduire ce que j’aurais à lui dire si, et seulement si (ouaf ouaf !), j’avais envie de lui conter tout cela ? Me rassasier ? Oui, c’est ça. C’est cela que je dois lui raconter.

« Bon, disons qu’ensuite je me suis réveillé. Mais à partir de cette nuit-là, tout a changé pour moi. Je ne sais plus qui a dit qu’un rêve non interprété est comme une lettre non lue… le fait est que je n’ai jamais ouvert l’enveloppe. Je n’avais plus le même regard sur le monde. J’ai été pris d’une frénésie totale pour une passion dont je ne pouvais me rassasier. L’imaginaire. Films, cinéma, télé, bandes dessinées. Lire, lire et encore lire. Tout ce que je pouvais trouver. Histoires fantastiques, récits de science-fiction, horreur, romans d’épouvante et autres contes surnaturels. Je ne pouvais plus m’en passer. Il me fallait ma dose. L’imaginaire pour trouver ma paix, quel que soit le contexte de ma vie.

La musique, aussi ! D’une importance capitale. Classique, rock, de film, tout ce qui pouvait me procurer la sensation de voyager hors de cette affligeante réalité.

Puis je me suis mis aux jeux de rôle. Quelle meilleure façon que d’opter pour ce loisir pour appréhender l’imaginaire ? Le destin voulait que mes faveurs aillent vers les choix les plus oniriques. Rêve de Dragon, Hystoire de fou, les deux chefs-d’œuvre rôlistiques de Denis Gerfaud, mais aussi Shattered Dreams et Dreamwalker. Des jeux ayant le Rêve comme thème et toile de fond. Mais le premier abordé fut celui que j’ai le plus joué : l’horreur dans les années vingt des romans de Lovecraft et son Appel de Cthulhu. D'autres, beaucoup d'autres ont suivis. GURPS, Rolemaster, Runequest, Star Wars, Hurlements, Chimères, Top Secret...
Tellement ! Des connus, des moins connus...

Nourri aux Star Wars et à l’Alien, j’ai fréquenté les salles obscures pour y voir des Blade runner, des Shining, Brazil et, bien plus tard réviser mes classiques avec Le Seigneur des Anneaux enfin sur grand écran. Et sur le petit, ce furent des séries comme Twin Peaks, X Files puis Heroes et Six Feet Under qui me bercèrent.

Mais c’est surtout sur le papier que je trouvais de quoi me nourrir. J’ai adoré le King, bien sûr, Stephen King. Il fut le premier à me divertir et à me suivre durant toute mon adolescence jusqu’à aujourd’hui. Lovecraft, Howard, Dan Simmons, Tolkien, Herbert, Clive Barker, Terry Pratchett, Lucius Shepard, George RR Martin, Matheson, Bernard Werber et ses fourmis, ou plus récemment Neil Gaiman, Catherine Dufour, Jean-Philippe Jaworski, et tant d’autres. Et puis ces petits jeunes du thriller français, Maxime Chattam — dont j’aime la candeur, sa fraîcheur dans la noirceur — et Franck Thilliez, deux auteurs qui n’ont pas manqué de me flanquer la pétoche.

Puis, je me suis mis à raconter mes propres histoires. Oui, oui. Ô, rien d’extraordinaire, mais je ne me suis jamais lassé d’en inventer, pour le jeu de rôle et… je me suis pris à vouloir écrire, à présent. Un scribouillard de plus dans un monde de tarés.

Voilà. J’ai tout dit. Mais, c’est quoi votre nom, déjà ?
Oui, je sais, vous ne me l’avez pas dit… justement. »

La pièce s’assombrit ou c’est ma batterie qui commence à merder ? Les ombres sont plus denses, me semble-t-il. Les effluves de mon soi-disant thé y sont peut-être pour quelque chose ! Le barbu, inconnu et gâteux, me regarde par-dessous des sourcils blancs, mais plus sombres, eux aussi…

« Ok, je continue. Et bien… Donc, je suis dans mon lit, cette fois brave quadragénaire, fatigué d’une longue et épuisante journée de boulot (toujours aussi éprouvante d’ennui et d’extrême lassitude…), prêt à récupérer d’un sommeil grandement mérité… oui, oui, je poursuis. Donc s’ouvre une porte, une porte que je n’avais jamais remarquée, dans le mur de ma chambre ! Étrange, ne trouvez-vous pas ? Mais la surprise fut de courte durée, comme dans ces rêves où l’on ne s’étonne plus de rien, où la bizarrerie fait partie des règles du jeu, où la logique est hors-la-loi.
Voyez-vous ça ? Vous ne semblez guère étonné ! Avez-vous la moindre idée de ce dont je parle ? Oui, oui, cela va sans dire. »

L’obscurité est tout de même plus flagrante qu’à mon arrivée, j’en suis certain. Pourquoi dois-je m’épandre en mots toujours plus nombreux, phrases toujours plus longues, à cet homme qui ne dit rien, dont je ne sais rien.

« Moi, cela m’a intrigué, c’est le moins qu’on puisse dire. Dans ma chambre, si familière, une porte qui ne pouvait être là. Et moi, bien sûr, je l’ai franchie. Et j’ai trouvé ce Chemin. Ce long sentier de terre ne menant nulle part et partout à la fois, où le vent caresse le visage et souffle son invitation à l’oreille. Depuis, j’y retourne chaque nuit. Oh, depuis peu, mais j’ai eu le temps d’y voir tout de même une quantité de choses. Des plus terrifiantes aux plus loufoques. Des plus tristes aux plus drôles. Des merveilles et des horreurs. J’y ai croisé de mystérieux voyageurs, traversé de curieuses agglomérations, fréquenté de sordides établissements. Et puis j’ai rencontré Bracasse… »

L’homme se lève brusquement ! Il crie de sa voix chevrotante ! Il en renverse presque son bol. Malgré mon ivresse, j’ai le réflexe de le rattraper avant que le délicieux liquide ne se déverse sur le sol de l’auberge. Quel dommage ce serait.

« Où il est ? Je n’en sais rien, mon brave. Long et tortueux est le Chemin, vous dirait-il d’ailleurs. J’ai eu beau faire, il n’a pas voulu m’accompagner à l’intérieur. Pourtant, ce sale temps aurait dû le convaincre. Curieuse créature, vous savez ? Répugnant à bien des égards, il fait pourtant montre de pas mal de courage parfois. Il m’a bien souvent dérouté, embrigadé dans des histoires plus ou moins louches, sombres même. Mais il m’a prouvé, sinon son amitié, sa volonté de ne pas me nuire et même de m’assurer de sa présence protectrice. Si tant est que ce drôle puisse protéger qui que ce soit. »

Furibond, voilà que ce vieillard tape des deux poings sur la table, à présent ! Que lui prend-il ? Bol en main, je m’écarte, toujours assis. Manquerait plus qu’il devienne violent. Les deux jeunes ont cessé de se bécoter. Je ne les vois presque plus, d’ailleurs, camouflés dans l’ombre. La belle arrivait avec mes haricots avant de reculer près du comptoir où le poltron d’aubergiste se terre. Quant aux autres, tournés vers nous, ils restent figés dans l’attente pesante d’un évènement qu’ils pressentent imminent.

Je bois une lampée de la fabuleuse mixture, directement à sa source, dans l’écuelle du vieux.

« Inutile de s’énerver. Je ne suis pas responsable de ce Bracasse, vous savez. On pourrait croire qu’il n’est qu’un animal ou un être difforme, de par sa petite taille et ses loques puantes, mais je vous assure qu’il est bien plus… il a toute sa tête et sait s’en servir, croyez-moi. S’il a pu vous nuire d’une quelconque manière, je vous conseille de voir cela directement avec lui. »

Son regard en dit long sur ce qu’il ferait si, justement, j’étais ce Bracasse. Pour un peu, je me demande s’il ne va pas ignorer le fait que je ne le sois pas.

Ouf, il se détourne. Quelques pas et il sort rejoindre la pluie, le vent et le froid. Je peux finir son bol ! C’est presque dans le noir que je le repose vide sur la table en relâchant mes membres tendus. Je ne vois plus les autres bien que j’entends, autour de moi, des bribes de murmures étouffés dans un brouillard presque palpable. Bah, de toute manière je n’ai plus faim.

Diantre, cette boisson est un délice ! Je suis ivre. J’imagine la petite chose puante, blottie sur une branche, protégée de la pluie par des feuilles plus larges, disposées comme à son habitude. Prends donc une douche, Bracasse, ça ne te fera pas de mal. Et ce vieil homme, à sa recherche ou en errance ? Mouillé, trempé, ça, c’est sûr. Quelque chose, dans son regard, quelque chose sur son visage. Il me fait penser… ses mimiques, ses gestes. En tout cas, il a le même goût que moi pour les infusions.

La nuit est totale, à présent. Je n’y vois plus rien. Je vais monter, maintenant, à tâtons. Trouver la chambre promise. Entrer, me coucher, dormir… ou me réveiller, c’est selon.

Le temps n’est qu’une issue qu’on a inventée pour se sortir de la merde.
Il me faudra bien me lever, cela va sans dire.
Voilà, tout y est.
J’espère ne pas vous avoir trop saoulé.
Croyez-moi, je suis quelque part entre ces lignes.

À bientôt, donc, sur l’un ou l’autre des forums.
Le temps n’est qu’une issue qu’on a inventée pour se sortir de la merde.
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Ashram Draconian
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Re: Edgar Grolles

Message par Ashram Draconian »

Bienvenue :chin :chin

Preum's
Premier Fidèle de l'Icone du Flood, Khalia :P
Familier Personnel de l'Icone du Flood, Khalia :D
GLOIRE A KHALIA :woohoo: :woohoo: :woohoo:
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tatayoyo
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Re: Edgar Grolles

Message par tatayoyo »

bienvenue, ho prolifique edgar :chin :chin :chin
vivement la retraite.
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xben
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Re: Edgar Grolles

Message par xben »

Bienvenue, tu à le record de longueur du "petit texte" ;)
Retrouvez mon jdra sur son blog !
Travaux en cours : Taé version B&B, adaptation et rédaction des scénarios : le temple perdu d estareth, à la recherche de Thémasthos, Le réveil d' Azmyshulghath et touche pas à ma fille... Tant de choses à faire, si peu de temps…
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Géraud Myvyrrian G
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Re: Edgar Grolles

Message par Géraud Myvyrrian G »

Bienvenue à toi!
(tu m'excuseras, je lirai le texte une autre fois par contre :p)
Le passé, c'était mieux avant
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pelon
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Re: Edgar Grolles

Message par pelon »

bienvenue
et pareil que myv,
je suis en mode j'ai pas le temps
"lovecraft au d20 ça me parle autant que du coca dans le vin"
myvyrrian a écrit : T'as tort. Tu n'imagines pas à quel point ça met dans l'ambiance...
La Moitié a écrit :cette histoire de taille, moi ça me tarabuste vraiment
ma création JDR, Western (96 page N&B, prix coutant : 4.42€)
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Argan Argar
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Re: Edgar Grolles

Message par Argan Argar »

bienvenue!
sympa la présentation.
+1 pour un fan de Dan Simmons!
J'ai combattu, Nous avons gagné.
http://ajajdr.forumactif.com/

Un joueur ne triche pas, il imagine une situation dans laquelle il ne peut pas perdre.
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Edgar Grolles
Chasseur de Chimères
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Re: Edgar Grolles

Message par Edgar Grolles »

Merci à vous.

J'ai écrit ce "petit texte" il y a un bail, maintenant, justement pour les présentations dans les forums. Je trouvais cela original et plus représentatif qu'un simple "bonjour, je m'appelle... , je lis... , j'écoute... ou je joue à..."

Et puis, c'est un peu une intro dans mon univers... ;)
Argan Argar a écrit :bienvenue!
sympa la présentation.
+1 pour un fan de Dan Simmons!
Ahhh, ce cher Dan. Je trouve un peu dommage les soucis (voir ICI) qu'il a eu avec son traducteur Jean-Daniel Brèque (que j'adore aussi, notamment pour ces choix de traduction). Hypérion est un Chef d'oeuvre de la SF.
Dernière modification par Edgar Grolles le dim. 30 nov. 2014 16:44, modifié 1 fois.
Le temps n’est qu’une issue qu’on a inventée pour se sortir de la merde.
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Sykes
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Re: Edgar Grolles

Message par Sykes »

LO ! ! !
;)
"Je suis ce que je cherche, et quand je trouve, je fais." Christophe
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Glorfindel
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Re: Edgar Grolles

Message par Glorfindel »

Bienvenue !
Le seul bon terrien est un terrien mort, et encore, généralement, il pue
Vieux proverbe Xeno
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